Chine

Synthèse

I. Contexte

La Chine s’intéresse à la recherche quantique depuis les années 1990, mais elle s’y est davantage impliquée depuis une quinzaine d’années et notamment en 2016 avec la publication du Plan national d'innovation scientifique et technologique, inclus dans son 13e Plan quinquennal (2016-2020). Ce plan établi sur 27 chapitres considère le domaine quantique comme un grand enjeu scientifique et technologique pour l’avenir. Il met en avant toutes les initiatives prises auparavant dans ce domaine et donne des orientations sur les lignes directrices pour l'avenir des technologies quantiques en Chine. En raison des investissements massifs dans ce secteur, elle a mis sur pied de nombreuses initiatives technologiques de grande envergure, telles que le Satellite Mozi lancé en 2016 et le Beijing-Shanghai Backbone Network mis en service en 2017.

 II. Contenu de la stratégie

Vision et principes de la stratégie

Le plan chinois vise à faire de la Chine un pays innovant et à établir un nouveau modèle d’innovation et de développement scientifique et technologique fondé sur l’idéologie marxiste-léniniste et les principes fondateurs de la République populaire de Chine. Cette vision repose sur les principes suivants :

• - Le soutien aux principaux besoins nationaux ;
• - L’accélération du rattrapage et le leadership mondial ;
• - L’orientation de la science et de la technologie au service du peuple ;
• - L’approfondissement des réformes comme une force motrice puissante ;
• - L’adhésion au développement axé sur les talents comme une exigence essentielle ;
• - L’adhésion des acteurs à l’idée globale de leadership.

Objectifs de la stratégie

L’objectif général de la Chine est d’effectuer un bond scientifique et technologique significatif avec des capacités d'innovation globales du pays se classant parmi les 15 premières au monde. De manière spécifique, la stratégie vise :

• L’amélioration de la capacité d’innovation indépendante. Cet objectif se traduit par l’augmentation du financement des programmes de recherche et de développement, la mise à contribution des entreprises industrielles d'une certaine taille dans les dépenses de recherche et développement à hauteur de 1,1 % de son chiffre d’affaires, le classement au deuxième rang mondial du nombre de citations d'articles scientifiques internationaux, le dépôt de 12 brevets d’invention pour un ratio de pour 10 000 personnes  et le doublement, par rapport à l’année 2015, du nombre de demandes de brevet déposées via le Traité de coopération en matière de brevets (PCT).
• Le renforcement du soutien au leadership de l’innovation scientifique et technologique. En tant qu’élément favorisant le développement économique, le cadre de recherche est mis à contribution pour stimuler l’évolution des entreprises technologiques. Il vise ainsi l’augmentation du revenu d'exploitation des entreprises de haute technologie à 3,4 milliards de yuans, la valeur ajoutée des services à forte intensité de connaissances à 20 % du produit intérieur brut (PIB) et le montant des transactions de contrats technologiques nationaux à 2 milliards de yuans, et la progression internationale visible des noms, marques et normes chinois et l’inscription des entreprises chinoises dans le top 100 des entreprises technologiques mondiales.
• L’amélioration des compétences et de la qualité des talents innovants. La constitution d’un groupe de talents scientifiques et technologiques stratégiques et d’entrepreneurs innovants est envisagée, et les mécanismes d’évaluation et d’incitation des talents sont améliorés.
• L’établissement des systèmes et mécanismes propices à l’innovation. Il s’articule autour de la clarification du cadre institutionnel et de gouvernance des milieux de recherche ainsi que de l’organisation de la collaboration entre le civil et le militaire.
• L’optimisation de l’écosystème de l’innovation et de l’entrepreneuriat. Elle consiste en une meilleure structuration de la réglementation en matière d’innovation scientifique et technologique, sont constamment améliorées et des droits de propriété intellectuelle, et l’augmentation du nombre de citoyens possédant des connaissances scientifiques à au moins 10 % de la population.

Déploiement global

Dans le cadre du déploiement de la stratégie, la communication quantique et les ordinateurs quantiques occupent la troisième place dans la liste des projets à développer. Il s’agira de « développer des technologies de communication quantique urbaines, interurbaines et en espace libre et développer des prototypes d’informatique quantique générale et des simulateurs quantiques pratiques ».

Écosystème de recherche

La stratégie chinoise repose sur un grand réseau de laboratoires et de chercheurs, dont la plupart sont des produits des universités occidentales. Au rang des universités, l’on a :

• L’Université des Sciences et Technologies de Chine : c’est le centre névralgique de la recherche quantique chinoise dépendant de l’Académie chinoise des sciences, qui abrite un dynamique département de physique quantique et de recherche en information quantique. Ses travaux portent sur les fondamentaux de la physique quantique et de la communication quantique, l’Informatique et simulation quantique, la mesure de précision quantique, la physique quantique théorique. Elle fait partie d’un consortium d’universités réunissant outre l’USTC, l’université de Nankin, le Shanghai Institute of Technical Physics, l’Institut des semiconducteurs et l’Université nationale de Technologie de défense (NUDT).
• La Beijing Academy of Quantum Information Sciences (BAQIS), fondée en décembre 2017 à l’initiative de la municipalité de Pékin. Elle regroupe Académie chinoise des sciences, l’université de Tsinghua et l’université de Pékin. Ce partenariat a conduit à la conception d’une plateforme cloud d'informatique quantique pouvant regrouper la puissance de calcul quantique de trois puces quantiques supraconductrices ; cette trouvaille présentée au Zhongguancun Forum 2023.

La stratégie repose aussi sur la collaboration entre le monde de la recherche et les entreprises. En dehors des spin-off telles que Origin Quantum, Alibaba Cloud, QuantumCTek, des entreprises d’État (China Shipbuilding Industry Corporation, China Electronics Technology Group Corporation, China Aerospace Science and Technology Corporation) interviennent aussi dans le domaine de l’industrie quantique. Bien qu’y étant marginalement impliquée – du moins officiellement, l’armée populaire de libération collabore avec les milieux de recherche. C’est dans cette logique que l’Université nationale de technologie et de défense abrite le Groupe QUANTA et le Centre interdisciplinaire pour l’information quantique.

III. Pour aller plus loin…

La Chine est appelée à jouer un rôle majeur dans le futur des technologies quantiques ; une étude révèle d’ailleurs le « déplacement progressif du centre de gravité de l’innovation mondiale vers l’Asie, et particulièrement la Chine » caractérisé par une augmentation considérable du nombre de publications scientifiques et de brevets déposés originaires de Chine. Au regard toutefois de son mode de gouvernance et de ses avancées technologiques, une alerte est sonnée face au risque d’autoritarisme centré sur les données.